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Métiers artisanaux d'autrefois
- Charron, Boisselier, Vannier, Chanvier, Cordier -

1 - Le charron

Un charron, au moins, dans chaque village jusqu'à la Grande Guerre. Cravant, pays de négoce, puis de vignes, a peu de fermes, de charrettes et de chevaux, comme le prouvent les inventaires et réquisitions de guerre : aucun Charron au -XVIe, 2 au XVlle et XVllle (pour les vignerons), 1 en 1800, plus en 1900, déjà industrialisé.

Le charron doit être polyvalent : déjà, dans la région, choisir son bois : orme blanc pour le moyeu, car il ne se fend pas ; chêne, résistant, pour les rais ; Frêne, solide et flexible à la fois, des jantes.

Ensuite, travail délicat du fer et du feu : en effet le bandage métallique ne doit pas être perpendiculaire aux rais, sinon l'ensemble roulerait vers l'extérieur... Le centre doit donc former un petit tonneau, afin que la roue adhère au sol dans toute sa largeur.


A Devers
B Ecuanteur
C Ecart
D Biseau

Le moyeu ressemble à un tonneau, sur lequel on fixe les deux demi-cercles, les "frètes". Mis sur un cadre pour tracer les "mortaises" des rais, creusées et percées, pour recevoir les "tenons" obliques, orientés de façon à créer I’ « écuanteur » de la roue.

L'ensemble s'ajuste dans le moyeu d'orme, et une languette ronde, (tenon rentrant dans la jante) la recueillera, faite de plusieurs morceaux rivés.

Le moyeu est alisé et reçoit la boîte d'essieu, en fonte, introduite de force, faisant fonction de coussinet pour la "fusée" de l'essieu. La "goupille" qui retient la roue peut être enlevée, pour réparation.

Puis c'est l'équilibrage, en vue d'une rotation parfaite, impliquant l'introduction de "coins" de chêne pour centrer la boîte d'essieu.

Cerclage final, nécessitant les techniques du tonnelier, avec martelage, emboutissage, fixation, au feu, afin d'arrondir le bandage adhérant à la jante.

Ce métier complexe requiert une grande technicité et habileté.

 

2 - Le Boisselier

Les premiers "contenants" de nos lointains ancêtres étaient en vannerie recouverte d'argile (pots à macération, réserves de baies et herbes aromatiques), puis en peau de chèvre et poterie cuite, enfin en bois : les Gaulois, excellents tonneliers, nous l'avons vu, eurent leurs ustensiles quotidiens grâce au Boisselier.

Au cours des siècles, la boissellerie se diversifie : la vaisselle -pots, pichets, hanaps, gobelets, bols, jattes, écuelles, cuillères,- restera longtemps en bois, mais les "nantis" Cravantais ont leur "Potier d'Étain" en 1602. La Faïence de Puisaye -Nevers et Moûtiers sont plus chers- se répand à la fin du XVllle siècle.

Cuves à "cervoise" (orge), bière (houblon, Xle siècle), vin, lessive ; brocs et seaux accrochés au mur, à la porte de la soue, de l'écurie, sur la margelle, dans la cuisine, à anses, pour légumes, chanvre, prospère ici, comme le prouve la rue des Chènevières. Plus tard, brocs à charbon, berceaux-nacelles, petits meubles...

 

3 - Fabrication du beurre familial

Les fermes de Cheuilly, de toujours, celles du Faubourg St Nicolas de la fin du XVllle, n'ont qu'une ou deux vaches, davantage après la chute de la vigne : si, vers 1760, le « Père Melon » vend crème, lait, fromage de chèvre, on ne produit que pour soi.

Chaque ferme a, déjà, une ou deux "ardoises" en bois, dalles de 90 cm / 1 m 50, percées d'un trou, bouché par un bâton : on y laisse reposer le lait, puis on ôte le bâton, et le lait écrémé coule dans un plateau de bois et on racle la crème restée sur l’ « ardoise ».

Pour en faire du beurre, il faut la laisser sûrir un peu, avant de la baratter avec le piston, actionné de haut en bas ; plus tard, le boisselier inventera la « Baratte rotative ».

Bientôt, cet artisan va trouver un autre débouché : le cidre.

 

4 - Fabrication artisanale du cidre

Sans concurrencer Normandie et Bretagne, la Puisaye tient une place honorable : Merry fournit les marchés d'Auxerre et de Saint Fargeau.

La crise de la vigne, avec l'arrivée du mildiou et du phylloxera, à la fin du XIXe siècle, va voir s'implanter l'arboriculture, et, déjà, tout propriétaire de pommiers faisait son cidre et son marc.

Quand on en a peu, l’ « ardoise » à beurre et le plateau servaient encore : on y faisait couler le moût bouillant, auquel, une fois refroidi, on ajoutait la levure.

Technique plus élaborée : avec d'immenses "tchuves" à cidre, en chêne, comme les tonneaux de vin, ceinturés d'abord de noisetier, puis cerclées de fer, encore travail du boisselier.

Le résidu compact, dur, sorti du pressoir, est déversé, sur de grandes toiles dans la cour de la ferme : on le "démitelait" à coups de pioche, pour en faire une bouillie, aussitôt„ pour éviter toute moisissure.

Une fois dans la cuve, les enfants, grimpés sur une petite échelle, la tassaient à coups de sabots, afin d'évacuer l'air, facteur de pourriture.

Couverte, la nuit, la cuve, chaque matin, était remplie jusqu'à 30 cm de l'ouverture. Le contenu, "fermé" par une couche de terre, se fissurait et on colmatait les interstices avec de la cendre de bois. Le tout fermentait jusqu'en février, et on cassait la croûte protectrice.

Une partie du cidre allait à la "Machine à distiller", pour le cidre comme pour le vin, à Cravant, à partir de 1815, il y a 3 "bouilleurs". On obtenait un alcool à 60°, les années chaudes. Le marc se bonifiait en tonneaux de 25 litres et, pour le parfumer, on prenait des fûts à Cognac ou à Vermouth !

Le cidre bourguignon gagne, chaque année, du terrain !

 

5 - Le Vannier

Récolte de l'osier, la vannerie.

Quand la région ne possède pas naturellement de joncs, il suffit de planter des branches de saule, en sol humide, et d'attendre... 3 ans pour récolter !

A CRAVANT, joncs et roseaux abondaient : on les achète aux "GRANDS MOULINS", ou aux pécheurs -les DIVERSIN surtout- qui amodient Yonne et « Fausse Rivière ».

Naturel ou cultivé, l'osier se récolte presqu'à l'hiver, (les tiges devant être, à la fois, hautes et encore flexibles) avec une lame montée sur un long manche, afin de les trancher sous l'eau.

Puis lavage et séchage, de 10 jours à...6 mois, selon le temps

Le vannier travaillait (un vannier à Cravant, en 1600 et en 1900) avec des joncs de l’Yonne et de la Cure, et de la paille de Cheuilly : poussant les tiges dans une corne de vache, évidée (utilisée comme un entonnoir), il liait, de temps en temps, la mèche grossière qui en sortait, avec un cordon, afin de la stabiliser.

Grâce à un os de patte d'oie, taillée en biseau, (utilisé comme une grosse aiguille), il passait, entre les brins, une nouvelle corde, enroulant le tout. Le « blé d'hiver », plus solide, est mêlé de brins de ronce : le vannier en fait des dessus de chaise, berceaux, paniers divers -à « tourtes » (de chanvre, aliment pour le bétail), bûches, légumes, pour chiens et chats...

Avec la paille de seigle, il confectionne aussi des RUCHES, à chambre unique, au trou central, les fonds étant, comme les paniers, « en croix » ou en « spirale ».

Ce type de ruche, datant du XVIe siècle, sera abandonné ; on ne peut surveiller les maladies (la loque) et on doit tuer, à la fumée de soufre, l'essaim, pour extraire rayons et miel!

Ici, au XVIIIème siècle, c'est BARDOU, de Vincelles, le fournisseur attitré.

Pour réduire l'épaisseur et la largeur, le vannier utilise 2 rabots : la « PLANETTE » et l’ « EQUARISSOIR ». Les brins sont taillés, avec un sécateur ("TRANCHET", "EPLUCHOIR") pour les bouts saillants, à la fin de l'ouvrage.

 

6 - Le Chanvrier

Le chanvre, cultivé, à Cravant dès le XVIe siècle, s'étend sur une terre humide et exposée à l'Est: des "Fossés" à Monteloup (de la Salle polyvalente à l'ensemble de pavillons) comme le prouve et rappelle la "rue des CHENEVIERES".

"ROUISSAGE" sur les bords de l'Yonne ou de l'Arbaut, SÉCHAGE, sur des cadres de bois, dans les Fossés, prés et dans les cours des maisons.

L'odeur, très forte, entraîne des "RÈGLEMENTS DE POLICE URBAINE" spécifiques, jusqu'au XIXe siècle, exigeant, pour ces activités, « 15m des maisons, la pestilescence nuisant et étant cause de maladies (?) pour bêtes et humains". On notera que le bétail, pour ces dangers, passe avant les Cravantais !

Planté "dru" ou "en rayons", au plus tard le 11 mai, les tiges mâles sont coupées entre le 15 août et le 8 septembre, le patron, St ROCH, étant fêté le 16 août.

Toute la plante est utile : séchée, en bottes, le grain tombé nourrit les poules et sert à la fabrication de l'huile des quinquets ; les résidus, mis en "tourtes"- il y a des paniers à cet effet- alimentent le bétail ; les "chevenottes" -bouts de tiges-, taillées "à la veillée", servent d'allume-feu, après trempage dans du soufre.

Selon les factures des URSULINES -Rue Maison-Dieu (devenue rue Bleue), depuis 1644- puis de l'HOPITAL (1767), les Sœurs en utilisent régulièrement, tissé par elles ou par le TISSERAND -famille IMBAULT, surtout-.

II faut "FOULER" les tiges, pour éliminer l'étoupe, les "PEIGNONS" obtenus pouvant, alors, être filés -draps, sacs, chemises grossières, torchons...- C'est le travail des femmes, à la "veillée", les hommes se gardant quelques lanières pour confectionner des cordes.

COLBERT avait bien préconisé la culture du LIN, à la place du chanvre, moins demandé -vu sa rugosité-, mais CRAVANT garda ses habitudes, aux XVIIIe et XIXe siècles.

 

7 - Le Cordier

Dans le Morvan, ce métier fut pratiqué jusqu'au début du XXe siècle.

Faute de hangars appropriés, il fallait de vastes allées ombragées, pour installer "DEVIDOIRS", "ENROULEURS", "PEIGNES A CARDER" , "CARETS"... : l'ancien "Fossé" de VEZELAY (devenu rue de la Corderie) était parfait!

On fabriquait licols, cordes de char, amarrage de charrue, longs câbles... : 1 MAITRE CORDIER et 2 AIDES, à Vézelay mais aussi à Auxerre et dans l'Avallonnais (petite industrie).

Marchés à Saulieu, Avallon, Joux-La-Ville (le dernier en 1926). L"ANNUAIRE des COMMERCES" ne signale plus de cordiers patentés, à cette date, mais quelques ouvriers, itinérants, travaillent "à la demande": "BOURONS", pour le dégrossissage puis "MATICHATS", appropriant le chanvre.

En 1910, le célèbre MARCHE DE VEZELAY ne voit plus que des Cordiers d'autres Provinces.

Comme beaucoup de métiers artisanaux, la CORDERIE s'arrête après la PREMIÈRE GUERRE MONDIALE. Même processus que pour les autres activités : plus de spécialistes, partis au Front et souvent morts au combat ; perte de la pratique et des techniques ; départ des jeunes attirés par la ville... Et c'est, pour TOUT, l'Âge de l'INDUSTRIALISATION !

Textes et recherches de Madame Odile GEORGE, Historienne, Cravant, Yonne

 


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